vendredi, septembre 25, 2009

COMMUNISME

UN CHANTIER EN PROJET

vol. 9, no. 26, 28 septembre 2009, $ 1.00

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C’est le temps d’une incursion dans les textes classiques du marxisme et les compléments théoriques qui les ont suivi. Ainsi, Karl Marx dans ses Manuscrits de 1844 (Œuvres choisies 1, Gallimard, Paris, 1963, p. 74) écrit que « Le communisme… est une phase réelle de l’émancipation et de la renaissance humaines, phase nécessaire pour l’évolution historique prochaine. Le communisme est la forme nécessaire et le principe énergique de l’avenir prochain. Mais le communisme n’est pas, en tant que tel, la fin de l’évolution humaine, - il est une forme de la société humaine. » Évidemment, cette définition s’inscrit en faux avec le préjugé tordu visant à décrire le communisme comme une société figée, sans mouvement, et condamnée à la paralysie sociale et économique. (Photo: un chantier montréalais)

Cela contredit bon nombre d’intellectuels contemporains, dont certains journalistes qui rapportent, à leur manière, l’information sur les réalités du monde, par intérêt ou ignorance. Quoique l’ignorance, on peut toujours en douter quand ils ont atteint une telle notoriété! À l’opposé, le correspondant du bulletin progressiste belge Investig’Action, James Petras, indique dans la livraison de juin 2009, à propos des événements en Iran: « De plus, la plupart des leaders d’opinion et des journalistes occidentaux basés à Téhéran ont extrapolé leurs projections à partir de leurs observations dans la capitale –ils sont très rares à s’aventurer dans les provinces, dans les villes, petites et moyennes, et dans les villages où Ahmadinejad (le président d’Iran, ndlr) bénéficie de l’essentiel de ses soutiens. S’ajoute à cela le fait que les partisans de l’opposition constituent une minorité agissante d’étudiants facilement mobilisables pour des manifs dans les rues, alors que les soutiens à Ahmadinejad se situent dans la majorité de la jeunesse ouvrière et chez les femmes au foyer, qui allaient pouvoir s’exprimer dans les urnes et n’avaient ni le temps ni l’envie de se lancer dans la politique de la rue. »

Est-ce que ce ne sont pas les mêmes intellectuels qui se font les porte-parole des guerres à venir et préparent l’opinion publique internationale à l’assaut des combattants pour la révolution « verte », « orange » ou colorée tout simplement.
La voix de la raison

Déjà en son temps, en 1764, Voltaire, martelait : « Que deviennent et qu‘importent l’humanité, la bienfaisance, la modestie, la tempérance, la douceur, la sagesse, la piété, tandis qu’une demi livre de plomb tirée de six cents pas me fracasse le corps, et que je meurs à vingt ans dans des tourments inexprimables, au milieu de cinq ou six mille mourants, tandis que mes yeux, qui s’ouvrent pour la dernière fois, voient la ville où je suis né détruite par le fer et par la flamme, et que les derniers sons qu’entendent mes oreilles sont les cris des femmes et des enfants expirants sous des ruines, le tout pour les prétendus intérêts d’un homme que nous ne connaissons pas? […] » (Dictionnaire philosophique, Guerre, Librairie Larousse, Paris, 1934, p. 93). Les correspondants, envoyés spéciaux et journalistes arrivent évidemment beaucoup trop tard pour recueillir les propos de tous ces Irakiens et Afghans qui ont vécu la guerre et l’occupation ces dernières années, y compris celle par les Forces canadiennes en Afghanistan.

Comment auraient réagi les journalistes occidentaux à cette déclaration politique: « Le gouvernement allemand est d’opinion que toutes les tentatives […] sont vouées à l’échec à moins que des mesures déterminées soient adoptées pour se prémunir de l’empoisonnement de l’opinion publique par des individus irresponsables dans leurs discours, écrits, films et pièces de théâtre. Le gouvernement allemand est prêt à n’importe quel moment à signifier son accord à une entente internationale qui barrera effectivement et rendra impossible toute tentative d’intervention de l’extérieur dans les affaires d’autres États. Nous sommes fermement convaincus, cependant, que notre époque ne verra pas le déclin, mais plutôt la renaissance de l’Occident. » Ce sont les extraits d’un discours prononcé en 1935 par Adolf Hitler auquel de nombreux citoyens dans le monde, incluant des Allemands très éduqués ont prêté foi et conclu qu’il était un leader en faveur de la paix, inspirant et visionnaire. (The Anti-Empire Report, William Blum, 09.06.2009).

Quelques années auparavant, l’écrivain soviétique Maxime Gorki, affirmait dans ses Articles sur la littérature, qu’un problème majeur dans la Russie prérévolutionnaire relevait de l’éducation des enfants; est-ce que l’Occident s’est libérée de celui-ci? « L’éducation […] découle de la lutte des classes et la lutte de l’individu pour se défendre lui-même, pour affirmer son individualisme et son nationalisme comme des formes et des lois ‘éternelles’ de comportement social. » (Collected Works, Volume X, On Literature, Progress Publishers, Moscow, 1982, p. 281). Gorki ne favorisait pas ce type d’éducation centrée sur l’individualisme.

L’intellectuel allemand, Karlheinz Barck, a, sous ce rapport posé la question: « Peut-on se contenter aujourd’hui d’un concept de littérature qui tire ses critères de valeur toujours et avant tout de distinctions esthétiques […] , au lieu de les recevoir à partir de fonctions sociales et de poser les questions ainsi : Qu’est-ce qui est lu? Pourquoi et comment? À qui sert telle littérature? Quelles formes et quels moyens servent quels buts? » (Recherches Internationales, Littérature, no. 87, Paris, 1976, p .127).

Les communistes s’interrogent

Pour ce qui est de l’avenir, les réponses venant des communistes ne sont pas toutes identiques. Même dans un pays pris à part, il peut apparaître des points de vue divergents. Ainsi le philosophe français, Lucien Sève, dans un livre, examine les questions suivantes : « Le communisme est-il désormais rayé de l’avenir? Avec le capitalisme, l’histoire aurait-elle dit son dernier mot? Comment la grande espérance d’émancipation dont est porteur le socialisme a-t-elle pu être trahie à ce point par des régimes s’en réclamant? » Il y répondra par la conclusion suivante : « Ce siècle ne se termine pas sur le constat de faillite du communisme mais bien plutôt sur la promesse de sa reprise. »
(Communisme, Quel second souffle?, Messidor/Éditions sociales, Paris, 1990, p. 9 et p. 263).

Un autre philosophe communiste français, Georges Gastaud, est plus incisif sur l’attitude de la direction du Parti communiste français; qui peut expliquer la désaffection de ce parti par une bonne partie de l’auditoire ouvrier, notamment chez les jeunes; il rappelle la dérive des dirigeants eu égard aux traditions passées et connues bien au-delà de la France. Ces traditions d’ailleurs, ont longtemps inspiré bon nombre de partis, dont le Parti communiste du Canada. Deux extraits d’un ouvrage de Gastaud en particulier retiennent l’attention: « En outre nous rejetons l’ « antistalinisme » primaire pour des raisons très actuelles: l’équation « antitotalitaire » Hitler=Staline n’a d’autre but, aujourd’hui comme hier, que de criminaliser le socialisme tout en banalisant le nazisme. » (Photo: à gauche, une affiche gauchiste dans une rue de Paris)

Deuxièmement, et un séjour à Paris au printemps 2009 a confirmé la conviction de l’auteur de ces lignes; c’est-à-dire les témoignages de militants de base, à l’effet que ces vingt dernières années ont marqué un virage négatif pour le parti communiste. Voici ce que Gastaud révèle : « En 1981, après une polémique contre Mitterand (alors président de la France, ndlr) dont la virulence cachait mal l’impuissance des dirigeants communistes de l’époque à affirmer une identité communiste déjà partiellement vidée de sa substance, et alors que le PS (parti socialiste, ndlr) reniait avec éclat le programme commun, ce fut la première participation ministérielle du Parti à un gouvernement de gestion loyale du capitalisme qui, après quelques mesures sociales destinées à fixer ‘l’état de grâce’, se montrera redoutablement efficace dans le démontage des acquis sociaux vainement attaqués par la droite giscardienne. » (Mondialisation capitaliste et projet communiste, Le Temps des Cerises, Pantin, 1997, p. 127 et p. 219).

La Vie Réelle qui maintient une riche correspondance avec des communistes français est en mesure de se rendre compte que les camarades plus âgés n’ont pas, fondamentalement, abandonné leur grande espérance dans un avenir meilleur et qu’ils ont à cœur de faire découvrir à l’étranger de passage et ami « certains lieux de ce pays ». Une parmi eux, Michèle, particulièrement convaincante, rassure: « Je suis ce que l’on a fait de moi. Je suis constituée comme héritière d’un patrimoine fait de bien et de tares, mais il m’incombe la responsabilité de la question qui, n’appartient qu’à moi seule: qu’est-ce que je fais de ce que l’on a fait de moi? Qu’est-ce que je décide de faire de cet héritage? » (Photo: contingent communiste à la manifestation du 1er Mai 2009 à Paris)

Cet article se termine en redonnant la parole à Karl Marx et Friedrich Engels, et d’abord à ce dernier qui, anticipant peut-être le leadership de Staline, explique dans une lettre rédigée en 1891 que : « Aussi bien Marx que moi-même, nous avons toujours été opposés à toutes les manifestations publiques à l’égard de personnes privées, à moins que ce soit le moyen d’atteindre un grand but; mais, plus que tout, nous sommes contre ce genre de démonstration qui se déroule du vivant des intéressés et ont nos personnes pour objet. » Pas question de culte de la personnalité; c’est clair!

Mais finalement, on doit citer Marx de nouveau compte tenu de sa grande lucidité quand il précise: « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières: il importe maintenant de le transformer. » (Idéologie allemande, Œuvres choisies 1, Gallimard, 1963, Paris, p. 164).


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samedi, septembre 19, 2009

VOIR PLUS LOIN

vol. 9, no. 25, 21 septembre 2009, $ 1.00
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Le journal People’s Voice de juillet 2009 a préparé le terrain pour les élections fédérales au Canada. Ainsi la chef du Parti communiste du Canada pour l’Ontario, Liz Rowley y est allée d’un cri du cœur: ce qui manque, c’est du « leadership ». « Le Congrès du travail du Canada (CTC) et le mouvement ouvrier doivent prendre l’initiative et organiser un sommet des organisations ouvrières et populaires de tout le Canada anglais et du Québec pour organiser une riposte coordonnée – un front commun de lutte pour freiner et s’attaquer à l’offensive des corporations et de mener le mouvement ouvrier et ses alliés d’une position défensive à l’offensive. »

En fait, elle appelle à la création d’une coalition populaire et ce, pour maintenant. D’ailleurs, Métro du 13 juillet faisait état du fait que les Canadiens étaient las d’un gouvernement minoritaire; d’après un sondage d’opinion 64% des personnes interrogées préféraient désormais un gouvernement majoritaire. Le quotidien conservateur The Gazette, en juillet, s’est dit pour sa part excédé par un gouvernement minoritaire cédant trop à la population pour se maintenir au pouvoir. Il renchérit : « Un gouvernement majoritaire? C’est dans les mains du Québec. » Reconnaissance de la balance du pouvoir au Canada par le peuple québécois.

Le 11 septembre… 1973

S’il est une date que les autorités états-uniennes doivent se rappeler, c’est bien le 11 septembre quand ils ont renversé, avec l’aide de leur bras armé et subversif qu’est la CIA (centrale d’espionnage et d’opérations spéciales) le gouvernement démocratique du Chili, dirigé par Salvador Allende qui est mort bien malheureusement cette journée-là, les armes à la main. (Photo: au Québec, on chante toujours pour le Chili en 2009; fête communiste à Montréal).

Comme l’a écrit une lectrice de La Vie Réelle tout récemment: « le Canada est toujours soumis aux Américains depuis des lunes et souvent ce sont nos enfants qui en écopent. » Le président du Chili et ses amis ne voulaient plus de cet état de fait pour leur peuple.

Quatre ans plus tard en 1977, une membre de la direction du parti communiste du Chili, Gladys Marin, écrivait dans la Nouvelle Revue Internationale*, revue de théorie et d’information des partis communistes et ouvriers, que du point de vue économique les faits ont démontré que les travailleurs « pouvaient eux-mêmes gérer directement la production. » C’est une réponse cinglante à ceux qui ridiculisent l’administration de l’économie par les travailleurs. À l’époque, des mesures ont été mises à exécution pour faciliter la participation des travailleurs, surtout dans le secteur public, mais « on n’a pas réussi à trouver des formes correspondantes pour développer cette participation dans le secteur privé, bien que là également des organisations aient été créées [notamment pour que les actions des patrons d’entreprise] n’aillent pas à l’encontre des intérêts nationaux. »

Question d’actualité: la gauche à la campagne. Pour le parti communiste du Chili, il était clair déjà à l’époque que « les petits et moyens cultivateurs doivent devenir des alliés du processus historique vécu par le pays, est contre-révolutionnaire celui qui par ses actions maladroites, les pousse du côté opposé. » Pour ce parti, « on n’a pas fait de sérieuses tentatives pour stimuler, comme le signalait le Programme de base du gouvernement de l’Unité populaire, le développement de formes d’exploitation coopérative de la terre par les petits propriétaires. » Les gauchistes ont profité de cette lacune pour miner l’action du gouvernement. Nous sommes toujours dans la période qui a précédé le Coup d’État de 1973.

Malgré tout, il y a eu des succès généralisés dans l’économie, « mais les forces révolutionnaires de notre pays n’ont pas su prouver que les progrès obtenus ont été le résultat des transformations en cours et créer des relations stables de type nouveau entre l’État, le secteur public de l’économie et les employeurs privés. » Pour le gouvernement, un objectif de taille a toujours été « la conquête des couches moyennes ».

C’est pour cela qu’une « juste politique d’alliances impliquait la nécessité de trouver un consensus entre l’Unité populaire et le Parti démocrate-chrétien qui était un parti de plusieurs classes, fortement impliqué dans les couches moyennes et qui jouissait d’une influence appréciable parmi les salariés. »

(Photo: carré St-Louis à Montréal, au coeur d'un quartier de classes moyennes).

En 1976, trois ans après le Coup d’État, les communistes chiliens soulignaient: « Sans doute, beaucoup de divergences ont existé et continuent de se manifester entre les marxistes et les démocrates-chrétiens; mais nous avons également des intérêts communs et l’histoire de notre patrie le montre clairement : chaque fois que nous avons réussi à réaliser des actions communes et à obtenir l’unité sur l’essentiel, le pays et le peuple en ont tiré des avantages concrets… »


Le parti libéral du Québec et le parti communiste

Pour les gauchistes québécois, ce sera une hérésie complète que d’appeler à soutenir les mesures progressistes et démocratiques du Parti libéral du Québec, mais l’expérience démontre que très souvent elles correspondent aux besoins des travailleurs de la Belle Province. En fait, les critiques ont surtout pour origine la « gauche » du Parti québécois et le véritable motif est le désir de réaliser l’indépendance du Québec.

Pour des raisons, peut-être contradictoires, les communistes et les libéraux n’envisagent pas l’avenir du Québec à l’extérieur de l’unité entre le Canada anglais et le Québec. Malgré tout, tous deux favorisent l’émergence d’un pouvoir fort et autonome du côté de Québec, ce qu’exprime le gouvernement du libéral Jean Charest. C’est aussi le vœu de la base électorale du Parti québécois, à n’en point douter.

Pour les couches les plus démunies de la population du Québec, par exemple les assistés sociaux, le gouvernement a mis en branle des programmes qui soutiennent les familles « pauvres »; les travailleurs à faible revenu sont aussi protégés par des lois qui leur permettent de survivre malgré la crise économique. Évidemment, le parti libéral n’est pas un parti de gauche, il s’agit plutôt d’un gouvernement pragmatique et du centre.

Le danger est ailleurs. Il est du côté de la droite; pratiquement les milieux conservateurs du Québec voudraient faire revivre l’époque de Duplessis par le biais de l’Action démocratique du Québec (ADQ). Depuis de nombreuses années déjà, ils cherchent à lui donner une crédibilité, à ravaler constamment la façade de ce panier de crabes afin de couper court aux droits acquis et de faire de la Belle Province une contrée sans histoire où les jeunes ne connaîtraient pas toutes les luttes difficiles de leurs aînés pour qu’on puisse bien vivre dans ce coin du Canada.


Voilà pourquoi, le parti communiste a intérêt à toujours mieux épouser les revendications et les aspirations des travailleurs, seul ou en coalition (mais ouvertement), et à assumer des tâches plus importantes dans l’espace économique et politique du Canada, et du Québec en particulier. Le but est certes la prise du pouvoir politique par la classe ouvrière. (Photo: raffinerie de pétrole dans l'est de Montréal, le vrai pouvoir au Canada).

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Réf. : La Nouvelle revue internationale, Paris, juillet 1977, p. 116 et ss.


*Cette revue est aujourd’hui remplacée par le réseau électronique SolidNet qui diffuse depuis Athènes (Grèce) les déclarations, documents et prises de position des partis communistes et ouvriers. On peut s’y abonner en cliquant sur info@solidnet.com.

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mercredi, septembre 02, 2009

OÙ NICHEZ-VOUS M. OBAMA?

vol. 9, no. 24, 7 septembre 2009, $ 1.00

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Déjà le 14 juin dernier, The Gazette reprenait les propos de la Secrétaire d’État des États-Unis, Hillary Clinton, à l’effet qu’elle « respectait profondément les commentaires du ministre (Lawrence Cannon, ndlr) et son inquiétude, mais comme le Président (Barack) Obama a dit, rien dans notre législation ne contredira nos obligations commerciales internationales, y compris avec le Canada ». En gros, elle soutient la loi états-unienne « Buy American ».

Dans un autre ordre d’idées, quelques jours plus tard, le président de l’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire de Cuba, Ricardo Alarcon, a inauguré une exposition de tableaux d’Antonio Guerrero, ami de La Vie Réelle, en déclarant fermement: « Nous rejetons catégoriquement tout type de décision qui n’inclut pas la libération (des Cinq de Cuba, ndlr). » Dans le Bulletin Cubart qui a suivi peu de temps après, soit le 23 juin, « les artistes cubains appellent ceux des États-Unis à appuyer le cas des Cinq […] L’appel réitère sa conviction que si le peuple nord-américain connaissait la vérité sur ce processus juridique, il mettrait toute son ardeur afin que les Cinq soient définitivement libérés et qu’ils reviennent au sein de leurs familles. »
(Photo: Antonio Guerrero en 2007 au pénitencier de Florence)



Il n’y a pas de doute, le président des États-Unis, devra cesser de tergiverser et déclarer sans hésitations de quel côté il se range: de la démocratie, ou plutôt de la dictature des riches possédants (d’entreprises ou de domaines agricoles). Il n’est pas le seul, comme le note par ailleurs Duff Conacher, coordonnateur de Democracy Watch, « les politiciens fédéraux (du Canada, ndlr), depuis 142 ans, ont failli à la tâche d’établir des systèmes de règlements et de mesures de contrôle pour garantir un gouvernement représentatif, honnête, éthique et ouvert; avec pour résultat le gaspillage de centaines de milliards de dollars en fonds publics, ainsi que l’abus et le tort faits à des milliers de personnes et des centaines de communautés souvent parce que les politiciens protégeaient leurs amis, les supporters du parti, les membres de la famille ou encore eux-mêmes ».

Mais revenons à l’Amérique latine, le 28 juin, on apprend que la consultation populaire est torpillée au Honduras après le coup d’État contre le président Zelaya du parti libéral. Le gouvernement des États-Unis est pointé du doigt. Ironiquement, le quotidien français -se proclamant de gauche- Libération, informe ses lecteurs, à propos de l’événement, soutient que ce président voulait « réduire une réforme constitutionnelle à la possibilité de réélection du président sortant […] L’exemple des réformes constitutionnelles dans la région montre qu’il s’agit de tout autre chose: permettre des transformations sociales en profondeur » auxquelles ne semble pas souscrire le quotidien parisien selon la dépêche d’Investig’Action de Belgique, du 6 juillet 2009. Sous ce rapport, le Front national de Résistance populaire qui s’est créé dans le pays, suite aux événements, affirme que le retour du président Zelaya ou encore le changement de gouvernement qui pourrait avoir lieu lors des prochaines élections générales ne le feront pas dévier de « ses objectifs à plus long terme appuyés par le peuple incidemment. » La porte-parole, Margarita Murillo, répondait ainsi à une entrevue réalisée pour le compte d’Argenpress.

Pourtant, le coup d’État semblait prévisible au Honduras. D’après Métro, « la tension était croissante ces dernières semaines au Honduras ». Le même journal ajoute que les « États-Unis, l’Union européenne, l’ONU, l’Organisation des États américains, le Venezuela et la Bolivie ont dénoncé ce coup d’État. » La même journée, Argenpress a rapporté qu’un fonctionnaire du Département d’État états-unien, préférant conserver l’anonymat, a déclaré que « nous reconnaissons Zelaya comme l’unique président constitutionnel du Honduras. Nous n’en reconnaissons pas d’autres. » Mais des organisations populaires latino-américaines, telle la Convergence des Mouvements des peuples des Amériques (COMPA), a affirmé, dans Argenpress deux jours plus tard, que le coup d’État est attribuable à la droite hondurienne, appuyée par « les groupes les plus réactionnaires des États-Unis. »

Investig’Action, quelques jours plus tard, a sollicité le point de vue de l’écrivain américain Michael Parenti qui souligne que « l’armée hondurienne est entraînée, conseillée, équipée, endoctrinée et financée par l’État sécuritaire national des États-Unis. […] Son silence a eu pour effet de se muer en acte de complicité, même si l’intention n’y était pas au départ. […] En tant que président, Obama a une influence considérable et des ressources immenses qui auraient pu faire échouer les auteurs du coup et qui pourraient d’ailleurs toujours être appliquées contre eux avec un effet certain. Aujourd’hui, sa position à propos du Honduras est trop molle et trop tardive, comme c’est en fait le cas avec un trop grand nombre de choses qu’il entreprend. » (Photo: siège montréalais d'une grande corporation du bitume aux fins industrielles)

Pour sa part, la ministre des Affaires étrangères des États-Unis, Hillary Clinton, espère qu’ « il pourra y avoir restauration de la démocratie ». Le président Obama lors de son voyage à Moscou, a déclaré que l’unique président constitutionnel du Honduras était Manuel Zelaya. Pendant ce temps à Washington, l’extrême droite et les faucons manoeuvraient pour que ce dernier négocie un « pardon humiliant pour les illégalités que lui attribuent les putschistes ».

Selon Argenpress, au début août, « le président du Costa Rica, qui est médiateur dans la crise, a proposé aux deux parties (Zelaya et Micheletti) une amnistie politique et la formation d’un gouvernement de réconciliation qui ramènerait la paix dans ce pays. »

Voici les crimes de Zelaya selon certains Honduriens:

- Il a haussé le salaire minimum;
- Il a amélioré les pensions des personnes âgées;
- Il a baissé le prix des transports publics;
- Il a augmenté le nombre de bourses pour les étudiants;
- Il a fait construire des écoles dans des zones rurales reculées…

Et on pourrait prolonger la liste; ces « illégalités » sont somme toute assez similaires aux droits dont jouissent déjà les Canadiens et les Québécois en particulier.

Chez nos voisins du Sud, le Parti communiste des États-Unis propose, afin d’augmenter la pression sur le gouvernement états-unien, que ses militants et le public en général entreprennent entre autres les démarches suivantes: « communiquer avec la Maison-Blanche et le Département d’État afin qu’ils annulent les visas des officiels militaires et civils du régime putschiste, de geler les comptes bancaires et de retirer tout leur personnel de la base militaire de Soto Cano…

Qu’en dirait Lénine?

Le peuple hondurien est plongé dans un marasme politique. A-t-il la force, y compris armée, pour reprendre le pouvoir dans son pays? Pour l’instant, et c’est louable, il fait entendre sa voix dans le pays: barrages routiers, manifestations de travailleurs et de la jeunesse, et désobéissances civiles… De plus, il peut compter sur la solidarité internationale. Mais le gouvernement états-unien semble avoir fait son choix; à tout le moins les éléments de droite et d’extrême droite incrustés dans l’appareil de l’État depuis le règne de George W. Bush.

Alors que reste-t-il à faire?

Lénine, dans des moments encore plus risqués, avait dit: « La phrase révolutionnaire, c’est la répétition de mots d’ordre révolutionnaires sans égard aux circonstances objectives, au changement marqué par les derniers événements en date, à la situation du moment. Des mots d’ordre excellents, qui entraînent et enivrent, mais sont dépourvus de base solide, telle est l’essence de la phrase révolutionnaire. [p. 11] Nous connaissons par l’expérience d’un demi-siècle de mouvement révolutionnaire en Russie une foule d’exemples d’une résistance inopportune à la réaction. [p. 17] Nous avons dit: l’insurrection n’est pas toujours opportune; faute de certaines prémisses à réaliser parmi les masses, elle tourne à l’aventure. [p. 17] Mais il n’est pas permis de tomber dans le désespoir, il est inadmissible d’oublier que l’histoire connaît des exemples d’humiliations plus grandes encore [p. 46] Pourtant, les peuples écrasés par des vainqueurs féroces et cruels ont su se redresser et reprendre vie. » (Œuvres, tome 27, Éditions Sociales, Paris, 1980)


Les services spéciaux états-uniens et le Canada

À n’en point douter, les services spéciaux états-uniens ont déployé toute l’artillerie lourde. Déjà, des voix mettent en garde les pays voisins susceptibles de connaître le même sort, même si le peuple hondurien n’a pas dit son dernier mot. Une question se pose: quelle est la relation des services spéciaux des États-Unis avec le Canada? Entendons-nous quels sont les liens du FBI, de la CIA notamment avec la GRC et le Service canadien du renseignement de sécurité et même de la Sûreté du Québec?
(Photo: édifice central du gouvernement fédéral du Canada au centre-ville de Montréal, le complexe Guy-Favreau)

C’est tout à fait normal et légitime que des organismes de sécurité existent au Canada pour assurer la protection des citoyens contre les terroristes, les fanatiques et les trafiquants de tous genres; mais ne risque-t-on pas de faire l’amalgame avec les groupes politiques, syndicaux et sociaux qui oeuvrent pour le mieux-être de la population? En plus, à quel niveau se situe la coopération entre les corps policiers et de sécurité entre les États-Unis et le Canada? Est-ce comparable à ce qui se passe en Amérique latine? Qui dirige qui? Le parlement canadien ou des instances étrangères? D’autant plus, que le type d’armement dont dispose l’armée hondurienne dans le cas qui nous occupe n’a rien à voir, disons, avec la lutte contre les cartels de la drogue. L’équipement sophistiqué et l’entraînement militaire a plutôt à voir avec le contrôle des populations locales… On ne peut accepter cela! On ne peut rester indifférent devant les exactions contres ces peuples qui en « arrachent » pour vivre juste un tout petit peu mieux. La démocratie, c’est bon pour tous les peuples. Il n’y a pas de petit ou de grand peuple. La liberté est une réalité en devenir pour tous.

Les Canadiens doivent se sentir blessés quand on sait que « le Canada est le seul pays des Amériques à ne pas avoir exigé explicitement le retour de Zelaya au pouvoir ». Ce fait a été rapporté par l’Agence de presse Canada-Amérique latine au début de juillet. De plus, le Canada n’a pas cessé son aide, y compris l’aide symbolique militaire, à la junte qui assume le pouvoir illégalement depuis le 28 juin, date du kidnapping du président Zelaya.

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