jeudi, novembre 20, 2008

UN ENTERREMENT DE PREMIÈRE CLASSE?

vol. 8, no. 17, 1-15 décembre 2008, $1.00

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La petite bourgeoisie québécoise invitée à tirer sa révérence

Depuis la fin de la révolution tranquille, la petite bourgeoisie, sur la lancée du nationalisme, a fait la pluie et le beau temps au Québec. Sa logique était la logique du peuple québécois; son histoire était l’histoire du peuple québécois et ses états d’âme étaient les états d’âme du peuple québécois. Elle était très active dans le mouvement syndical ainsi que dans le milieu artistique et donnait le ton dans les moyens de communication. Aussi, ce n’est pas sans surprise que l’auteur de ces lignes est tombé sur un article publié en novembre dernier dans la revue du Conseil central du Montréal métropolitain de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Unité, portant sur la dernière course présidentielle aux Etats-Unis et affirmant: « Mais, soutenir que les deux candidatures [McCain et Obama] s’équivalent, comme d’aucuns semblent le dire, reviendrait à soutenir que Dion et Harper n’ont que leur nom pour se distinguer l’un de l’autre. Une analyse un peu plus fine démontrerait pourtant que même si les Libéraux sont bien loin d’être à gauche dans l’échiquier politique, ils sont tout de même plus loin, en tant que groupe, de la droite religieuse et archaïque que les Conservateurs, brillants élèves de l’école républicaine états-unienne… » C’est très judicieux et très juste!

Marx et Engels dans le Manifeste du parti communiste rédigé en 1848 relevaient que « la suprématie industrielle et politique de la bourgeoisie menace [la petite bourgeoisie] d’une certaine destruction, d’une part par la concentration du capital et de l’autre par la montée d’un prolétariat révolutionnaire. » Ne pouvait-il pas en être autrement quand toute conscience politique se butait le nez contre le nationalisme triomphant au Québec? L’ancien premier ministre du Québec, Bernard Landry –du Parti québécois-, n’avait-il pas dit avec dédain qu’il rejetait la conception d’un Québec divisé en classes sociales? On peut même se souvenir que dans les institutions scolaires, des professeurs conspuaient des esprits brillants comme Voltaire, parce qu’il avait osé proclamer dans Candide, par exemple: « Vous savez que ces deux nations [l’Angleterre et la France] sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut. » Comme le souligne la maison d’édition (Larousse), Voltaire ne pouvait ignorer que ce pays n’était pas la cause principale de la guerre de 1758.

L’enseignement de l’histoire du Canada a beaucoup laissé à désirer pour des générations d’élèves et d’étudiants. Ainsi, ce n’est que beaucoup d’années plus tard que des pionniers de la coopération nous apprennent leur engagement de jeunesse qui se poursuit, avec la foi du charbonnier, jusqu’à nos jours. Une amie de La Vie Réelle, Raymonde Giguère, écrit: « J’ai fondé la première coop étudiante féminine et la première caisse Desjardins au Couvent de Limoilou.[…] Marcel [mon époux] a fondé il y a 10 ans la Coop de Services à domicile Cap-Diamant.[…] Marcel et moi sommes des mordus de coopération… » Vraiment, la voie était déjà toute tracée!

Même le président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Réjean Parent, se met à rêver dans Nouvelles CSQ, de l’automne 2008, en écrivant: « Je plaide en faveur d’un investissement de 700 millions dans le réseau scolaire afin de rejoindre minimalement la moyenne canadienne et j’exige un engagement comparable dans l’enseignement postsecondaire afin de combler le sous financement chronique de nos établissements collégiaux et universitaires. »

Le Québec n’est pas venu au monde dans les années 1960 et ne rend pas l’âme dans les années 2000.

Du nouveau? Oui, il y en a. Ne serait-ce que l’annonce par le bulletin de la CSN, Webdo Info, à l’effet qu' « en prévision d’une campagne de changement d’allégeance en juillet 2009, la CSN et la FTQ annoncent une paix syndicale entre les deux organisations qui s’interdisent tout maraudage dans le secteur public et parapublic. » Le journal de la FTQ, Le Monde ouvrier, en a fait sa une, lui aussi.

Ailleurs dans le monde

Il serait bon de rappeler quelques promesses faites par le nouveau président Barack Obama « qui s’était prononcé contre l’invasion de ce pays [l’Irak] en 2003, [et qui] veut retirer l’essentiel des troupes américaines en 16 mois, d’ici à l’été 2010, pour ne garder sur le terrain que des forces chargées de la lutte antiterroriste. » L’Agence France Presse (AFP), s’est faite l’écho de cette prise de position et a aussi rapporté le propos du président élu des Etats-Unis: « J’ai dit plusieurs fois que je voulais fermer Guantanamo, et je vais m’y tenir. » C’est la prison où est détenu le jeune Canadien Omar Khadr. Enfin, il a promis de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 80% d’ici 2050.

Quant au président sortant, George W. Bush, il a confié à l’Agence France Presse par le biais de sa porte-parole, lors du soir du scrutin, le 4 novembre 2008, que « souvent, quand vous faites de grandes choses, que vous prenez des décisions, elles ne sont pas populaires… » Il y a un mot en français pour décrire une pareille attitude: présomption. Et c’est un euphémisme. D’ailleurs, en marge de la rencontre du G20 à Washington, George W. Bush avait déclaré à la presse, et ses propos ont été retenus par le journal Métro du 14 novembre 2008: « Le président américain a défendu vigoureusement le capitalisme … » Fidel Castro, dans un article pour Argenpress du 17 novembre 2008 affirme que: « le document [final] ne dit pas un mot de la politique visant à convertir les aliments en combustible tel que proposé par les Etats-Unis, des échanges inégaux dont sont victimes les peuples du Tiers-monde, ni sur la stérile course aux armements, de la production et du commerce des armes, de la rupture de l’équilibre écologique, et des menaces graves pour la paix qui se dressent devant le monde au bord de l’extermination. »

C’est une note culturelle qui clôt ce bulletin. En novembre, des joueurs de cornemuse cubains ont participé au Festival international du Cap Breton en Nouvelle-Écosse, où la cornemuse écossaise des hautes terres y est arrivée avec les premiers colons au Canada anglais. Certes, la musique adoucit les mœurs, mais elle rapproche les peuples dont les idéologies semblent à l’opposé à première vue, et dont l’antagonisme est constamment renforcé par les mass media occidentaux, mais qui fait tomber les Murs qu’ils soient de Jéricho ou d’ailleurs, bien malgré ceux-ci.

Enfin, le bulletin électronique Cubart du 19 novembre (no. 48) informe que le Ballet « Lizt Alfonso Dance Cuba », fondé en 1999, a donné des représentations au Canada récemment. Mme Alfonso évalue la complicité établie entre le spectateur et sa proposition scénique: « Nous sommes heureux de pouvoir travailler dans d’importantes places et interagir avec les diverses cultures de la géographie canadienne, chaque fois que nous nous présentons, nous sentons que nous sommes auprès de personnes qui nous aiment et apprécient notre art. »

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vendredi, novembre 07, 2008

ÉLECTIONS: DEUXIÈME ACTE

vol. 8, no. 16, 16-30 novembre 2008, $ 1.00

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Avant-propos

Pimpante et souriante, l' épouse d'un des travailleurs mis en lock-out à l’usine montréalaise de Pétro-Canada, avoue que même si c’est parfois difficile, le moral est très bon chez ces travailleurs qui en sont maintenant, en novembre, à un an d’arrêt de travail. Faut-il le rappeler, ils sont sur la ligne de feu pour freiner les reculs que la direction de la compagnie veut leur imposer, en particulier au niveau de la sécurité au travail. Vous pouvez faire un geste simple et concret pour les appuyer:

BOYCOTTEZ PÉTRO-CANADA!

Les élections fédérales du 14 octobre 2008

On doit s’attendre à un gouvernement qui va marcher sur des œufs. N’est-il pas minoritaire avec 143 des 308 sièges? Plus encore les promesses conservatrices seront constamment remises sur l’avant-scène par les associations populaires, les partis politiques et le mouvement syndical. Le parti conservateur occupe néanmoins tout le trottoir, il a poussé tout le monde à la rue. Et dans la rue, on marche en scandant des slogans…

Toutefois, la prudence s’impose: même si le Parti conservateur compte dans ses rangs des éléments d’extrême droite, ce n’est pas un parti d’extrême droite. Pour mieux éclairer cette affirmation, rappelons au lecteur qu’il y a 75 ans est entrée en vigueur en Allemagne la loi pour freiner la reproduction des malades mentaux qui donna lieu à 400 000 stérilisations forcées de personnes qui avaient un handicap ou une faiblesse physique ou mentale. Ce sont les nazis qui ont voté la loi en juillet 1933 quelques mois après l’arrivée de Hitler au pouvoir.

Nous n’en sommes pas là avec le Parti conservateur de Stephen Harper, même si, et il faut le répéter, des éléments d’extrême droite grenouillent dans ce parti. Le Premier ministre serait plutôt du genre à défendre des positions comme celle du mouvement Desjardins qui dans une publicité sur l’assurance-vie met en garde les consommateurs sur l’avenir du système de santé public en diffusant le message suivant: « Personne ne sait pendant combien d’années encore le système de santé public offrira des services gratuits. Aurez-vous économisé suffisamment pour vous payer des soins privés, des médicaments coûteux ou permettre à un membre de votre famille de prendre un congé sans solde pour devenir votre aidant naturel? » Voilà le genre de réflexion que pourrait reprendre à son compte le cabinet Harper même si la santé ne relève pas formellement des compétences fédérales.

La parole revient au chef du Nouveau parti démocratique, Jack Layton qui, au soir du scrutin, a déclaré aux média, dont La Presse: « Nous commencerons la prochaine session parlementaire prêts à travailler avec les autres partis pour servir les intérêts des Canadiens. Et nous allons mettre notre programme de l’avant. Nous lutterons pour protéger les économies, les pensions, les emplois et les maisons des Canadiens, chaque jour de la prochaine session. »

Un post-scriptum réjouissant: aucun conservateur n’a été élu dans l’Île de Montréal, la plus grande ville du Québec… Ni d’ailleurs dans les principales villes du Canada!

Dans certains pays, comme la Colombie, le gouvernement a recours à la violence insoutenable, débridée et inqualifiable pour assujettir les populations au profit des multinationales. Ce qui a fait bondir le prix Nobel de la Paix, Adolfo Pérez Esquivel qui dans une lettre au président Uribe, du pays en question, affirme que « l’on veut gouverner et faire taire le peuple par la terreur et par la mort. » Il fait ici référence à une répression policière brutale contre la protestation indigène qui a eu lieu à 600 km de Bogota, la capitale : un enfant est décédé et il y a eu une centaine de blessés.

Pour revenir au Canada, Argenpress du 15 octobre 2008, quotidien électronique publié à Buenos Aires en Argentine, précise: « Cependant, les analystes ont indiqué que Harper connaîtra un moment difficile lorsqu’il tentera d’aborder les questions économiques sans détenir une majorité parlementaire. Si au prochain printemps, les libéraux élisent un nouveau chef plus habile, d’autres élections ne tarderont pas à venir. » Argenpress prend même à témoin la Banque du Canada qui affirme en date du 24 octobre 2008 que la crise économique mondiale aura « un effet important sur l’économie du Canada qui évitera à peine la récession. »

Pour le Nouveau parti démocratique (NPD) et le Parti communiste du Canada (PCC), ils feront encore face à un préjugé tenace eu égard au capitalisme, et c’est Fidel Castro qui l’affirmait dans une Réflexion du 14 octobre 2008: « le capitalisme tend à se reproduire dans n’importe quel système social, parce qu’il origine de l’égoïsme et des instincts de l’homme. La société humaine n’a pas le choix: elle doit surmonter cette contradiction parce qu’autrement elle ne pourra pas survivre. » Le NPD a fait des gains lors de cette élection, soit sept sièges de plus. Inquiétude: seulement 60% des citoyens canadiens se sont prévalus de leur droit de vote. Pourquoi? Le cynisme, l’incrédulité ou le fatalisme (Ça ne changera jamais! C’est toujours pareil!).

Pourtant le journal communiste People’s Voice, de la première quinzaine de novembre 2008, relève le fait que s’il y avait un vote proportionnel au Canada : le Nouveau parti démocratique aurait 57 sièges (et non 37) et le Parti vert 23 (et non 0). Quant au Parti libéral, il occuperait 81 sièges et non 76.

Deuxième acte: le Québec

Vrai, les démocrates du Québec ont agi pendant cette dernière campagne électorale. Pour le lecteur moyen qui a suivi celle-ci à distance, il aura appris que la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec (FTQ) ainsi que la Confédération des syndicats nationaux (CSN) ont appuyé le Bloc québécois et que visiblement, elles se prépareraient à appuyer le Parti québécois. C’est l’appui crucial qui fait si cruellement défaut au parti Québec solidaire qui n’hésite pourtant pas à se prononcer en faveur des travailleurs québécois.

C’est d’autant plus important maintenant si on se fie aux révélations de l’Institut de la statistique du Québec, selon lesquelles 9,7 % des Québécois « étaient à faible revenu en 2005 », oui vous avez bien lu près de 1 sur 10! L’an dernier, 720 231 personnes ont fréquenté une banque alimentaire au Canada, dont le cinquième au Québec; plus de la moitié étaient bénéficiaires de l’aide sociale et 12,6% recevaient un revenu d’emploi. Métro des 24-26 octobre 2008 écrit que « le Canada doit s’attendre à plusieurs mois de croissance économique anémique. » Les Etats-Unis, notre principal partenaire commercial est, lui, en récession. Le parti communiste de Grèce souligne que l’on ne peut « arguer qu’une crise égale à celle de 1929 est survenue déjà. […] Aujourd’hui, nous n’avons pas développé les conditions pour renverser le pouvoir capitaliste, mais les conditions annoncent la possibilité de développements accélérés en faveur des peuples… »

Le peuple des Etats-Unis a fait un choix historique : celui de s’impliquer en politique et d’élire un candidat qui sort des canons conformistes. Il est Noir. Il est jeune. Il transcende les couleurs, parce qu’il fait rêver tous les démocrates, y compris ceux du monde entier dont le Canada. Bravo monsieur Barack Obama!


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