samedi, septembre 19, 2009

VOIR PLUS LOIN

vol. 9, no. 25, 21 septembre 2009, $ 1.00
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Le journal People’s Voice de juillet 2009 a préparé le terrain pour les élections fédérales au Canada. Ainsi la chef du Parti communiste du Canada pour l’Ontario, Liz Rowley y est allée d’un cri du cœur: ce qui manque, c’est du « leadership ». « Le Congrès du travail du Canada (CTC) et le mouvement ouvrier doivent prendre l’initiative et organiser un sommet des organisations ouvrières et populaires de tout le Canada anglais et du Québec pour organiser une riposte coordonnée – un front commun de lutte pour freiner et s’attaquer à l’offensive des corporations et de mener le mouvement ouvrier et ses alliés d’une position défensive à l’offensive. »

En fait, elle appelle à la création d’une coalition populaire et ce, pour maintenant. D’ailleurs, Métro du 13 juillet faisait état du fait que les Canadiens étaient las d’un gouvernement minoritaire; d’après un sondage d’opinion 64% des personnes interrogées préféraient désormais un gouvernement majoritaire. Le quotidien conservateur The Gazette, en juillet, s’est dit pour sa part excédé par un gouvernement minoritaire cédant trop à la population pour se maintenir au pouvoir. Il renchérit : « Un gouvernement majoritaire? C’est dans les mains du Québec. » Reconnaissance de la balance du pouvoir au Canada par le peuple québécois.

Le 11 septembre… 1973

S’il est une date que les autorités états-uniennes doivent se rappeler, c’est bien le 11 septembre quand ils ont renversé, avec l’aide de leur bras armé et subversif qu’est la CIA (centrale d’espionnage et d’opérations spéciales) le gouvernement démocratique du Chili, dirigé par Salvador Allende qui est mort bien malheureusement cette journée-là, les armes à la main. (Photo: au Québec, on chante toujours pour le Chili en 2009; fête communiste à Montréal).

Comme l’a écrit une lectrice de La Vie Réelle tout récemment: « le Canada est toujours soumis aux Américains depuis des lunes et souvent ce sont nos enfants qui en écopent. » Le président du Chili et ses amis ne voulaient plus de cet état de fait pour leur peuple.

Quatre ans plus tard en 1977, une membre de la direction du parti communiste du Chili, Gladys Marin, écrivait dans la Nouvelle Revue Internationale*, revue de théorie et d’information des partis communistes et ouvriers, que du point de vue économique les faits ont démontré que les travailleurs « pouvaient eux-mêmes gérer directement la production. » C’est une réponse cinglante à ceux qui ridiculisent l’administration de l’économie par les travailleurs. À l’époque, des mesures ont été mises à exécution pour faciliter la participation des travailleurs, surtout dans le secteur public, mais « on n’a pas réussi à trouver des formes correspondantes pour développer cette participation dans le secteur privé, bien que là également des organisations aient été créées [notamment pour que les actions des patrons d’entreprise] n’aillent pas à l’encontre des intérêts nationaux. »

Question d’actualité: la gauche à la campagne. Pour le parti communiste du Chili, il était clair déjà à l’époque que « les petits et moyens cultivateurs doivent devenir des alliés du processus historique vécu par le pays, est contre-révolutionnaire celui qui par ses actions maladroites, les pousse du côté opposé. » Pour ce parti, « on n’a pas fait de sérieuses tentatives pour stimuler, comme le signalait le Programme de base du gouvernement de l’Unité populaire, le développement de formes d’exploitation coopérative de la terre par les petits propriétaires. » Les gauchistes ont profité de cette lacune pour miner l’action du gouvernement. Nous sommes toujours dans la période qui a précédé le Coup d’État de 1973.

Malgré tout, il y a eu des succès généralisés dans l’économie, « mais les forces révolutionnaires de notre pays n’ont pas su prouver que les progrès obtenus ont été le résultat des transformations en cours et créer des relations stables de type nouveau entre l’État, le secteur public de l’économie et les employeurs privés. » Pour le gouvernement, un objectif de taille a toujours été « la conquête des couches moyennes ».

C’est pour cela qu’une « juste politique d’alliances impliquait la nécessité de trouver un consensus entre l’Unité populaire et le Parti démocrate-chrétien qui était un parti de plusieurs classes, fortement impliqué dans les couches moyennes et qui jouissait d’une influence appréciable parmi les salariés. »

(Photo: carré St-Louis à Montréal, au coeur d'un quartier de classes moyennes).

En 1976, trois ans après le Coup d’État, les communistes chiliens soulignaient: « Sans doute, beaucoup de divergences ont existé et continuent de se manifester entre les marxistes et les démocrates-chrétiens; mais nous avons également des intérêts communs et l’histoire de notre patrie le montre clairement : chaque fois que nous avons réussi à réaliser des actions communes et à obtenir l’unité sur l’essentiel, le pays et le peuple en ont tiré des avantages concrets… »


Le parti libéral du Québec et le parti communiste

Pour les gauchistes québécois, ce sera une hérésie complète que d’appeler à soutenir les mesures progressistes et démocratiques du Parti libéral du Québec, mais l’expérience démontre que très souvent elles correspondent aux besoins des travailleurs de la Belle Province. En fait, les critiques ont surtout pour origine la « gauche » du Parti québécois et le véritable motif est le désir de réaliser l’indépendance du Québec.

Pour des raisons, peut-être contradictoires, les communistes et les libéraux n’envisagent pas l’avenir du Québec à l’extérieur de l’unité entre le Canada anglais et le Québec. Malgré tout, tous deux favorisent l’émergence d’un pouvoir fort et autonome du côté de Québec, ce qu’exprime le gouvernement du libéral Jean Charest. C’est aussi le vœu de la base électorale du Parti québécois, à n’en point douter.

Pour les couches les plus démunies de la population du Québec, par exemple les assistés sociaux, le gouvernement a mis en branle des programmes qui soutiennent les familles « pauvres »; les travailleurs à faible revenu sont aussi protégés par des lois qui leur permettent de survivre malgré la crise économique. Évidemment, le parti libéral n’est pas un parti de gauche, il s’agit plutôt d’un gouvernement pragmatique et du centre.

Le danger est ailleurs. Il est du côté de la droite; pratiquement les milieux conservateurs du Québec voudraient faire revivre l’époque de Duplessis par le biais de l’Action démocratique du Québec (ADQ). Depuis de nombreuses années déjà, ils cherchent à lui donner une crédibilité, à ravaler constamment la façade de ce panier de crabes afin de couper court aux droits acquis et de faire de la Belle Province une contrée sans histoire où les jeunes ne connaîtraient pas toutes les luttes difficiles de leurs aînés pour qu’on puisse bien vivre dans ce coin du Canada.


Voilà pourquoi, le parti communiste a intérêt à toujours mieux épouser les revendications et les aspirations des travailleurs, seul ou en coalition (mais ouvertement), et à assumer des tâches plus importantes dans l’espace économique et politique du Canada, et du Québec en particulier. Le but est certes la prise du pouvoir politique par la classe ouvrière. (Photo: raffinerie de pétrole dans l'est de Montréal, le vrai pouvoir au Canada).

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Réf. : La Nouvelle revue internationale, Paris, juillet 1977, p. 116 et ss.


*Cette revue est aujourd’hui remplacée par le réseau électronique SolidNet qui diffuse depuis Athènes (Grèce) les déclarations, documents et prises de position des partis communistes et ouvriers. On peut s’y abonner en cliquant sur info@solidnet.com.

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