jeudi, décembre 17, 2009

NOËL ET LE NOUVEL AN

vol. 9, no.38, 21 décembre 2009, $ 1.00

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On souhaite toujours que l’an nouveau nous apporte paix, bonheur et santé. La Vie Réelle n’échappe pas à la règle. Pour le profane, comme se fait-il, songera-t-il, qu’un écrit communiste se mêle de religion? En son temps, Karl Marx, reprenant les mots d’un philosophe grec antique, avait dit que : « rien de ce qui est humain, ne saurait m’être étranger ». Lénine a emboîté le pas. L’auteur de l’ouvrage Lénine, la philosophie et la culture, Jacques Milhau, n’a-t-il pas rappelé que le leader soviétique « assurait les croyants du respect de leurs convictions, acceptait l’adhésion de religieux au Parti et avançait la thèse de la subordination de la lutte pour l’athéisme aux exigences de la lutte des classes ». On peut retrouver cette idée dans ses Œuvres (tome 15, Éditions Sociales, Paris, 1909, p. 432).
(Photo People's World: manifestation aux États-Unis pour la libération des Cinq de Cuba, sous Bush; à réitérer sous Obama?)

Lénine a même cité Engels qui « déclare dans son Ludwig Feuerbach que le matérialisme et l’idéalisme sont les courants philosophiques fondamentaux. Le matérialisme tient la nature pour le facteur premier et l’esprit pour le facteur second; il met l’être au premier plan et la pensée au second. L’idéalisme fait le contraire. Engels met l’accent sur cette distinction radicale entre les ‘deux grands camps’ qui séparent les philosophes des ‘différentes écoles’ de l’idéalisme et du matérialisme, et accuse nettement de ‘confusionnisme’ ceux qui emploient ces deux derniers termes dans un autre sens. » (V. Lénine, Œuvres, tome 14, Éditions Sociales, Paris, 1908, p. 100).

En 1844, Karl Marx, dans la Question juive, a affirmé que « l’État peut donc être émancipé de la religion, même si la grande majorité des citoyens demeurent religieux en leur vie privée ». (Karl Marx, Œuvres choisies-1, Gallimard, Paris, 1963, p. 75).

Mais dira le premier loustic venu : les Canadiens-français (catholiques, ndlr) ne vont plus à la messe depuis belle lurette! C’est vrai, mais ce n’est pas complètement vrai. Il y a désertion des églises. Même si au dernier recensement de la population, il y avait 10 000 000 de catholiques au Canada (population totale : 33 millions, dont 7,6 millions au Québec), et sûrement la grande majorité au Québec, le « pays » de la nation canadienne-française, les gens, y compris les jeunes, ont continué de croire. Certains croient à Dieu, d’autres en une force créatrice et immanente, ou encore en un pouvoir fondateur. En général, les gens ne croient plus en l’Église, en grande partie en raison des errements et exigences parfois très dures du clergé pendant ses longues années d’accointance avec le pouvoir politique, notamment avec Maurice Duplessis –mais même avant-, avec le régime colonial britannique qui l’a associé à la domination du peuple, après la conquête de 1760.

D’autres diront : mais vous ne faites pas mieux, vous les communistes! Le président Barack Obama dans The Audacity of Hope (Random House of Canada Ltd., Toronto, 2006) souligne qu’on commet parfois l’erreur de croire que le système capitaliste fonctionne bien et de lui-même : « La faillite du communisme et du socialisme comme second choix d’organisation économique a d’ailleurs renforcé cette idée (p. 178) ». Plus loin, il ajoutera que : « l’année que je suis né, le Président Kennedy a déclaré dans son discours inaugural : ‘à tous ces gens vivant dans des huttes et des villages dans au moins la moitié du monde tentant de surmonter la misère, nous promettons nos efforts les plus soutenus pour les aider, pour tout le temps que ça prendra – pas parce que les Communistes pourraient le faire, pas parce que nous voulons leurs votes, mais parce que c’est juste. (pp. 371-372) ».
(Photo Comité Valmy: pauvreté en Occident aussi)




Combien de guerres l’administration états-unienne n’a-t-elle pas fomenté ? D’ailleurs, c’est l’issue de la deuxième guerre mondiale en 1945 qui a permis à son industrie de se déployer et d’envahir de nouveaux marchés, ne serait-ce que l’Europe de l’Ouest dévastée… Ceci explique cela, n’est-il pas, M. Obama ? Que répondriez-vous à Bertolt Brecht qui écrivait : « aussi longtemps que nous ne pourrons vivre qu’en recherchant la bonne affaire, aussi longtemps que l’on dira ‘toi ou moi’ et non ‘toi et moi’, aussi longtemps qu’il s’agira non de progresser, mais de devancer les autres –aussi longtemps il y aura la guerre. Aussi longtemps que le capitalisme existera, aussi longtemps la guerre existera. » (Les Arts et la révolution, L’Arche, Paris, 1970, p. 113).

Bien sûr, il faut se souvenir que le fieffé et ineffable sieur Bush ne ferait pas mieux. Vous comprendrez alors toute notre indignation et notre colère quand vous vous avisez de l’imiter ; l’Afghanistan, ça vous dit quelque chose ?

Montesquieu, l’homme de loi a laissé des textes formidables tels que « De l’esprit des lois » où il dit : « Nés pour la Société, ils (les stoïciens, ndlr) croyaient tous que leur destin était de travailler pour elle : d’autant point à charge, que leurs récompenses étaient toutes dans eux-mêmes ; qu’heureux par leur philosophie seule, il semblait que le seul bonheur des autres pût augmenter le leur. » (Éditions Sociales, Paris,1977, p. 240).

Bon, et à quoi ça mène toute cette tirade ? rétorquera le Président. D’abord à dire que les Croyants et les Athées partagent beaucoup de choses : générosité, respect et compassion humaine… Ils sont généralement honnêtes vis-à-vis eux-mêmes et leur entourage, ça va de soi.
(Photo People's World: manifestation pour la protection de l'environnement et la lutte à la pollution industrielle, à Copenhague, décembre 2009).


En 1937, le pasteur protestant Martin Miemöller (1892-1984) fut arrêté et envoyé dans un camp de concentration et en 1941, transféré au camp de Dachau ; libéré en 1945 avec la chute du régime nazi. Il a rédigé ce poème, dont nous reproduisons quelques extraits :

« Quand il sont venus chercher les communistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’étais pas communiste. (…)
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas catholique. (…)
Puis ils sont venus me chercher,
Et il ne restait personne pour protester."


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