lundi, avril 28, 2008

LE SOCIALISME NE PEUT MOURIR

vol. 8, no. 5, MAI 2008, $ 1.00



Il n’y a rien de tel que de vulgariser une idée qui a tant de fois été décriée ou rabâchée par des «émules» qui finalement ne l’ont jamais comprise. À l’exception de C. Willard qui, dans son livre Socialisme et communisme français, affirme : «Socialisme». Le mot, inventé en 1803 par un obscur écrivain italien, Giulani, passe d’abord inaperçu […] Mais le concept de socialisme adopte, à ses origines, le simple aspect d’une notion morale opposée à l’individualisme. Il ne revêt son sens moderne, et de façon encore floue, que dans les années 1840.»

Ainsi quatre ans plus tard, alors qu’il rédige les Manuscrits de 1844, Karl Marx va plus loin en démontrant que le socialisme n’est qu’une étape vers un univers supérieur : le communisme. Pour lui, «le communisme… est une phase réelle de l’émancipation et de la renaissance humaines, phase nécessaire pour l’évolution historique prochaine. Le communisme est la forme nécessaire et le principe énergique de l’avenir prochain. Mais le communisme n’est pas, en tant que tel, la fin de l’évolution humaine, - il est une forme de la société humaine.»

Ici, en Amérique du Nord, en particulier au Canada (incluant bien sûr le Québec), les partis communistes n’ont pas encore été des partis de masse, même s’ils ont eu des élus au parlement, notons Fred Rose de Montréal qui a siégé à la Chambre des communes après la deuxième guerre mondiale. En 1879, dans une entrevue qu’il a accordé au Chicago Tribune, Karl Marx, parlant des États-Unis, a discuté de l’idée voulant «que le mouvement ouvrier a été importé par les étrangers [alors que depuis 1857] le mouvement ouvrier a pris une importance assez grande. À cette époque les syndicats locaux prirent leur essor, ensuite on créa des centrales syndicales pour les différents métiers, et enfin ce fut l’Union Ouvrière Nationale. Cette progression chronologique montre que le socialisme est né en Amérique sans l’aide de l’étranger…»

D’ailleurs, l’hebdomadaire progressiste de Chicago, People’s Weekly World, rappelait en avril 2008 que le socialiste états-unien Eugene Victor Debs (1855-1926) «s’est présenté en tant que candidat aux présidentielles au nom du Parti socialiste, cinq fois, et a recueilli près du million de voix en 1912 et en 1920.» Certes, les communistes n’ont jamais pris le pouvoir aux États-Unis via les élections comme il est susmentionné, par contre comme l’a déclaré l’ami de Marx, Friedrich Engels, en 1895, dans son introduction au livre de celui-là, s’intitulant Les luttes de classes en France, « si le suffrage universel n’avait donné d’autre bénéfice que de nous permettre de nous compter tous les trois ans […] ce serait déjà plus que suffisant. Mais il a encore fait bien davantage. Avec l’agitation électorale, il nous a fourni un moyen qui n’a pas son égal pour entrer en contact avec les masses populaires.»

Mais l’idée même du communisme a été largement galvaudée au Canada. On craint même les communistes! Alors que dans le programme du Parti communiste du Canada adopté en 2001, on peut y lire que : «dans un Canada socialiste, les principaux moyens de production et de distribution de la richesse appartiendront collectivement à la société dans son ensemble. L’exploitation de la force de travail sera abolie. La dégradation écologique sera stoppée et une approche planifiée en matière de relations entre la vie humaine et l’environnement sera mise en œuvre […] Le socialisme établira finalement une nouvelle société basée sur la solidarité, l’égalité et l’émancipation.» Tout de même, le lecteur qui ignorait jusqu’à l’existence d’un parti communiste au Canada, se posera un jour la question: pourquoi ne progresse-t-il pas? Deux raisons l’expliquent : la relative prospérité du pays par rapport aux pays en voie de développement, surtout due à leur surexploitation éhontée, ainsi que les campagnes répétées contre le mouvement communiste : ici la Chine, là Cuba et puis au Canada dans les organisations populaires, tels les syndicats par exemple. Cependant les communistes du Canada ont donné beaucoup et continuent incidemment d’apporter tout autant au mouvement démocratique et à la classe ouvrière du Canada. Ne citons que Tim Buck qui a participé à la fondation du parti communiste en 1921 à Guelph, près de Toronto, et qui fut élu son secrétaire général en 1929 jusqu’en 1962. Il a été incarcéré pour activités «séditieuses» en 1931, libéré deux ans plus tard et acclamé au Maple Leaf Gardens dans la Ville-reine. Le bi-mensuel ouvrier de Vancouver, People’s Voice, en a fait état en mars 2008.

Vers un peuple réellement souverain

Le problème n’est pas exclusif au Canada. Depuis quelques années, l’offensive du grand capital, des milieux de droite et d’extrême-droite après la chute du mur de Berlin et la disparition de l’Union soviétique a porté un coup dur, mais pas décisif, aux partis communistes. Suite aux dernières élections en Italie –à la mi-avril 2008- le journal communiste Rinascita della sinistra avoue amèrement que «la dure défaite que nous avons subi est indiscutable. Le peuple italien a dit qu’une gauche sans âme n’est pas une gauche […] Les communistes sont déjà à pied d’œuvre pour reprendre le chemin avec plus de force, de fierté et de détermination qu’avant», d’autant plus qu’ils sont maintenant exclus du parlement.

Même à l’époque de Lénine, celui-ci a publié, après la révolution d’Octobre, en 1925 (mais rédigé vers 1895), un court ouvrage sur le programme des communistes russes où il reconnaissait que «nous ne tenons nullement la doctrine de Marx pour quelque chose d’achevé et d’intangible; au contraire, nous sommes persuadés qu’elle a seulement posé les pierres angulaires de la science que les socialistes doivent faire progresser dans toutes les directions s’ils ne veulent pas retarder sur la vie.» Quant à la droite, que dit-elle? Elle serait au-dessus de tout soupçon et sans failles. Nonobstant, comment expliquer l’information de la Société Radio-Canada en avril dernier à l’effet que des agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) aient dû perquisitionner les bureaux du Parti conservateur du Canada à Ottawa? Selon Élections Canada, des «candidats ont gonflé artificiellement leurs dépenses pour obtenir un remboursement plus élevé de l’État fédéral.» Évidemment, ça n’excuse pas les erreurs et les manquements de la gauche en général. Tout ce que cela prouve, c’est que le parti conservateur n’est pas au-dessus de tout soupçon et … après seulement, ironiquement, quelques mois de pouvoir.

Mais le point d’orgue à tout ce discours, c’est la question de la paix et de la guerre. Ce sera une longue citation; elle vaut le coup: «Mais ce militarisme porte aussi en lui le germe de sa propre ruine. La concurrence des divers États entre eux les oblige d’une part à dépenser chaque année plus d’argent pour l’armée, la flotte, les canons, et…, donc à accélérer de plus en plus l’effondrement financier, d’autre part, à prendre de plus en plus au sérieux le service militaire obligatoire et, en fin de compte, à familiariser le peuple tout entier avec le maniement des armes, donc à le rendre capable de faire à un moment donné triompher sa volonté en face de la majesté du commandement militaire.» C’est tiré d’un ouvrage de Friedrich Engels, Anti-Dühring., rédigé à la fin des années 1870.

Enfin, revenons à l’objet de notre démarche. «Le communisme n’est pour nous ni un état qui doit être créé, ni un idéal sur lequel la réalité devra se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’état actuel.» Merci Karl Marx et nous relirons L’idéologie allemande.

Nous reviendrons sur le communisme. Pour aujourd’hui, la leçon est terminée.

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